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CHP12 - 09. Se créer liberté
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CHP12 - 09. Se créer liberté

Le siècle du moi - 2ème partie

1. Introduction

Dans ce dernier épisode consacré à Max Stirner, Michel Onfray analyse la dernière partie de L’Unique et sa propriété à travers le prisme de la philosophie du droit de Hegel : la famille, la société civile et l’État. Stirner y apparaît comme un anti-Hégélien absolu, démolissant les fondements de la pensée idéaliste et appelant à une existence fondée sur l’unicité, l’insoumission et la révolte permanente. Onfray conclut aussi cette saison par une triple lecture de Stirner : existentialiste, révoltée, et micropolitique.

L'unique et sa propriété - Max Stirner
L'unique et sa propriété - Max Stirner

2. Contre le mariage et la famille : l’amour libre comme condition de l’unicité

Stirner critique le mariage comme idée fixe et institution oppressive, en opposition frontale avec Hegel, pour qui le mariage est un acte éthique fondé sur le droit. Pour Stirner :

  • Le mariage aliène l’unicité en assignant à chacun un rôle fixe.

  • La fidélité est une forme de soumission à une promesse morte.

  • L’amour libre est une association temporaire entre égoïstes, fondée sur l’intérêt mutuel et réversible.


3. Contre le travail : la dépossession de soi

Hegel valorise le travail comme voie d’accès à la liberté. Stirner inverse totalement cette perspective :

  • Le travail est une aliénation, une expropriation de soi.

  • Le salariat est une forme d’esclavage moderne, où l’individu abdique son unicité.

  • À l’opposé, Stirner célèbre la réappropriation, y compris par le vol, si celui-ci affirme la puissance de l’individu contre un ordre injuste.


4. Contre l’État : refus du sacrifice et de la soumission

Hegel sacralise l’État, qu’il décrit comme un être divin terrestre. Stirner dénonce :

  • L’État comme tyran froid, qui exige le sacrifice de la vie.

  • La confusion entre moralité et légalité, où l’État définit le bien et le mal.

  • L’idéal stirnerien est celui d’une désobéissance totale, où l’unique refuse toute délégation de pouvoir.


5. L’association d’égoïstes : alternative libertaire

Face aux institutions rigides, Stirner propose l’association d’égoïstes :

  • Contrat libre, réversible, sans transcendance.

  • Permet d’augmenter sa puissance en s’associant ponctuellement à d’autres uniques.

  • C’est un outil de micropolitique, qui permet une résistance diffuse, locale, et concrète contre toutes les formes de pouvoir.


6. Stirner existentialiste avant l’heure

Onfray rapproche Stirner de l’existentialisme sartrien :

  • Comme chez Sartre, il n’y a pas d’essence donnée : on se fait soi-même.

  • La responsabilité radicale engage chaque individu à devenir ce qu’il est.

  • Le refus du rôle, du destin ou de la classe fait de Stirner un précurseur du « l’existence précède l’essence ».


7. Stirner, penseur du révolté contre le révolutionnaire

Stirner rejette les révolutions idéologiques (communisme, anarchisme) car elles remplacent une oppression par une autre :

  • Le révolutionnaire d’aujourd’hui devient le conservateur de demain.

  • Stirner valorise la révolte permanente, individuelle, sans finalité messianique.

  • Onfray le compare à Camus, contre Sartre, dans la figure du révolté éternel.


8. Une pensée prophétique et subversive

Stirner anticipe :

  • Les critiques modernes du pouvoir (Foucault, Deleuze, Guattari).

  • La micropolitique comme forme de lutte disséminée.

  • La nécessité de désinstitutionnaliser les valeurs, et de les recréer individuellement.


💡 Conclusion

Max Stirner nous invite à une existence radicalement libre, déliée de toutes les structures hétéronomes (État, famille, travail, religion). Sa philosophie est une éthique de l’unicité, où l’individu s’affirme contre tout ce qui le nie. Par la révolte, l’association d’égoïstes et la désobéissance, Stirner propose une micropolitique de résistance à toutes les formes d’asservissement. Pensée du refus, elle est aussi une philosophie de la création de soi.


📚 Philosophes mentionnés

  • Platon (env. 428–348 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de la tripartition sociale et de la rationalité politique.

  • Hobbes (1588–1679) — Philosophe anglais, théoricien de l’État fort et de la guerre de tous contre tous.

  • Jean-Jacques Rousseau (1712–1778) — Philosophe du contrat social.

  • Immanuel Kant (1724–1804) — Philosophe du devoir moral et du mariage comme contrat rationnel.

  • Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770–1831) — Philosophe idéaliste allemand, auteur de la Philosophie du droit, théoricien de l’État.

  • Max Stirner (1806–1856) — Philosophe allemand, auteur de L’Unique et sa propriété, penseur de l’individualisme radical.

  • Karl Marx (1818–1883) — Philosophe communiste, visé indirectement par Stirner.

  • Paul Lafargue (1842–1911) — Socialiste français, auteur du Droit à la paresse.

  • Friedrich Nietzsche (1844–1900) — Philosophe allemand, lecteur indirect de Stirner, théoricien de la volonté de puissance.

  • Sigmund Freud (1856–1939) — Fondateur de la psychanalyse, créateur du concept de pulsion de mort.

  • Karl Popper (1902–1994) — Philosophe libéral, auteur de La société ouverte et ses ennemis.

  • Jean-Paul Sartre (1905–1980) — Philosophe existentialiste français, auteur de L’existentialisme est un humanisme.

  • Albert Camus (1913–1960) — Philosophe et écrivain français, auteur de L’homme révolté.

  • Gilles Deleuze (1925–1995) — Philosophe français, co-auteur avec Guattari de Mille Plateaux, théoricien de la micropolitique.

  • Michel Foucault (1926–1984) — Philosophe français, penseur du pouvoir diffus et de la résistance.


Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie

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