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CHP12 - 08. Jouir de la vie
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CHP12 - 08. Jouir de la vie

Le siècle du moi - 2ème partie

1. Introduction

Dans cet épisode intitulé Jouir de la vie, Michel Onfray explore la pensée de Max Stirner, en suivant la structure des principes de la philosophie du droit de Hegel. Cet exposé s’inscrit dans une série dédiée aux radicalités existentielles du XIXe siècle. Stirner y est présenté comme un penseur profondément hédoniste, bien que cette dimension ne soit pas explicitement revendiquée dans son œuvre, L'unique et sa propriété.

L'Unique et sa propriété
L'Unique et sa propriété - Max Stirner

2. Stirner face à Hegel : le dionysiaque contre l’apollinien

Onfray oppose la pensée dionysiaque, chaotique et profonde de Stirner, à celle, apollinienne, ordonnée et structurée de Hegel. Alors qu'Hegel utilise une logique systématique et dialectique, Stirner s'exprime à travers des variations répétitives, comparées au « Boléro » de Ravel ou aux compositions minimalistes de Steve Reich.


3. Une éthique de la force et de la souveraineté individuelle

Stirner considère la morale sous l’angle strictement individuel : chacun se préfère naturellement aux autres. Il établit une « ontologie noire » fondée sur la force pure, où le droit et la propriété sont déterminés par la puissance individuelle. La société devient alors un champ de bataille où seuls les forts l'emportent.


4. Jouir comme affirmation radicale du moi

Selon Stirner, le bonheur ne peut être donné par aucune autorité extérieure (État, régime économique, religion) mais doit être pris activement. Jouir, c’est exercer sa puissance individuelle, c’est prendre plutôt que recevoir. Cette jouissance radicale légitime tous les actes qui affirment le moi, même aux dépens d’autrui.


5. L’association d’égoïstes : une politique de la puissance

Face à l’oppression collective, Stirner propose l’association ponctuelle d’individus (égoïstes) pour renforcer leurs forces individuelles. Ces alliances sont temporaires, motivées exclusivement par l'intérêt commun momentané, et constituent une résistance possible à toutes formes de pouvoir collectif.


6. La critique radicale du christianisme et de ses avatars athées

Stirner s’oppose violemment à toute morale issue du christianisme, même sous des formes laïcisées comme celles proposées par Feuerbach ou Bauer. Pour lui, les athées restent souvent pieux sans le savoir. Il appelle à dépasser complètement le christianisme pour instaurer une « époque nouvelle » libérée du péché originel et de la culpabilité.


7. L’éloge de la destruction comme jouissance suprême

La jouissance chez Stirner réside dans la destruction du vieux monde, des idoles et des idéologies dominantes. Détruire ce qui oppresse, c'est exercer une jouissance libératrice. Cette approche radicale fait écho à la pensée nietzschéenne qui suivra.


8. Légitimité individuelle face au droit établi

Stirner considère que la légalité imposée par un État est une oppression, car elle nie la souveraineté individuelle. Il légitime ainsi l’infanticide, le suicide ou le duel, affirmant que chacun est propriétaire de sa vie, s'opposant radicalement à Hegel et Kant qui subordonnent l’individu à la légalité étatique.


9. Stirner précurseur du post-christianisme

Selon Onfray, Stirner annonce une ère post-chrétienne. Il invite à dépasser définitivement la morale chrétienne pour inventer un nouvel individu affranchi de toute transcendance. Cette démarche anticipera la pensée nietzschéenne et les débats philosophiques du XXe siècle.


10. Une pensée dangereuse mais essentielle

Bien qu'extrêmement radicale, voire dangereuse par ses implications sociales, la pensée de Stirner est aussi une puissante critique de toute forme d'autoritarisme, y compris celles qui découlent de philosophies considérées comme modérées ou progressistes. Onfray insiste sur la nécessité de lire Stirner pour mieux comprendre les risques inhérents à toute philosophie politique.


💡 Conclusion

Stirner propose une éthique hédoniste fondée sur la jouissance individuelle radicale et la souveraineté absolue du moi. Sa critique violente du christianisme, de l'État, et même des idéologies athées, offre une base pour penser une nouvelle ère débarrassée des culpabilités et des oppressions anciennes. Cette pensée, bien que dérangeante, constitue un avertissement puissant contre les dérives possibles de tout système de croyance ou d’autorité collective.


📚 Philosophes mentionnés

  • Étienne de La Boétie (1530-1563) — Philosophe français, auteur du Discours de la servitude volontaire.

  • Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, théoricien de la dialectique idéaliste.

  • Ludwig Feuerbach (1804-1872) — Philosophe allemand, critique de la religion.

  • Max Stirner (1806-1856) — Philosophe allemand, auteur de L’unique et sa propriété, partisan radical de l’individualisme.

  • Karl Marx (1818-1883) — Critique de Stirner, théoricien du communisme.

  • Friedrich Nietzsche (1844-1900) — Philosophe allemand, influencé indirectement par Stirner, auteur du concept du surhomme.


Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie

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